État des lieux du terrorisme en Iran et son influence sur l’instabilité au Moyen-Orient – Université de Picardie Jules Verne

Intervention du Dr. Alejo Vidal-Quadras dans le colloque international “Les relations entre l’ Union européenne et l’Iran: regards croisés” à l’Université de Picardie Jules Verne, Amiens 7 Novembre 2016

Le terrorisme émanant de l’intégrisme islamiste s’est transformé aujourd’hui en « terrorisme sans frontières ».

Le monde civilisé, avec toutes ses valeurs et acquis, fait face à un défi sans précédent et un péril gravissime. Si l’urgence du problème n’est pas en cause, une réponse appropriée s’avère pourtant pressant pour les responsables politiques.

Il est clair qu’il ne s’agit pas d’une confrontation entre l’Occident et l’Islam avec ses plus de 1,7 milliard de fidèles. C’est la conception réactionnaire et violente de l’islam, avec ses visées politiques sous couvert de religion, qui est au centre du conflit. En effet, l’intégrisme est une idéologie mortifère dont les musulmans sont les premières victimes.

Alors que la crise syrienne et la montée de groupes terroristes comme l’Etat Islamique ou Daech ont miné notre sécurité en Europe, l’adoption d’une politique adaptée est urgente.

Jusque dans les années 1970, il n’y avait pas de pensée codifiée ou structurée dans le monde musulman qui tolèrerait des actes de génocide ou l’assassinat en masse des musulmans modérés et des chrétiens au nom de Dieu et de l’Islam, ou le rejet des frontières nationales et la création d’un gouvernement totalitaire présenté comme un califat islamique. Il y avait bien sûr du terrorisme en Palestine, en Egypte et dans d’autres pays arabes, mais il était fondé sur des considérations politiques et non sur un concept de religion assoiffé de sang et fanatique.

La prise du pouvoir par l’ayatollah Khomeiny en Iran en 1979 et l’établissement de la première théocratie musulmane du monde contemporain a été un déclencheur déterminant dans l’apparition de ce phénomène.

Le caractère particulier de fondamentalisme islamisme fait que nous n’avons plus simplement affaire à un défi géopolitique qui menace le Moyen-Orient. Il faut reconnaître qu’avec l’expansion des communications et à l’âge d’Internet, ces développements affectent directement nos sociétés. Le nombre d’Occidentaux partis se battre dans les rangs de Daech et d’autres groupes terroristes rappelle que nous ne sommes plus face à un défi géopolitique, mais à des menaces qui mettent en péril la sécurité du monde dans son ensemble.

 

L’objectif déclaré de l’intégrisme islamiste consiste à imposer la charia par la force : c’est le dénominateur commun à tous les courants islamistes, des mollahs chiites en Iran, aux califats de Daech et d’Al-Qaïda dans d’autres régions.

Il convient de rappeler que c’est l’ayatollah Khomeiny, le fondateur du principe du « pouvoir absolu du guide suprême » qui a usé pour la première fois le terme de “califat islamique” ou ” calife musulman” pour décrire le pouvoir islamiste qu’il comptait édifier en Iran. Outre leur objectif commun, les fondamentalistes chiites et sunnites partagent les mêmes particularités : l’application violente des lois de la charia, l’établissement d’une tyrannie monstrueuse au nom du gouvernement de Dieu, épousant un califat islamique universel sans aucun respect pour les frontières nationales, la répression des femmes, la violation des droits fondamentaux de l’homme, la répression des opposants de la charia, etc.

 L’Iran est le pays le plus peuplé de la région, il a des frontières avec six pays musulmans. L’influence de l’Iran sur les sociétés musulmanes est bien plus grande que ses pouvoirs substantiels.  Au cours des siècles passés, les scientifiques et universitaires iraniens ont eu un immense impact sur le développement et la culture en terre d’islam.

L’impact et la conséquence directe de la formation d’un régime intégriste dans un pays aussi important que l’Iran, avec une position inégalée dans le monde islamique, ont permis à Téhéran de devenir le parrain spirituel, politique et stratégique de tous les islamistes du monde, malgré leurs divergences. La simple installation d’une théocratie dans un pays aussi déterminant que l’Iran a fourni aux groupes intégristes islamistes – auparavant marginalisés et sans vue sur le pouvoir politique – la capacité et la perspective d’émerger comme une force politique destructrice cherchant à s’élever à n’importe quel prix en un État politique.

 

La politique systématique de Téhéran, avec l’utilisation active de groupes inféodés, a considérablement accéléré ce processus. Une situation similaire à la position de Moscou dans la seconde moitié du 20e siècle, soutenant les mouvements et les États communistes dans le monde. Il y avait beaucoup de partis communistes et marxistes avec beaucoup de différences idéologiques internes. Mais Moscou jouait un rôle vital pour tous. Cependant, avec la chute de l’Union soviétique, tous ces États et mouvements ont reçu un coup fatal et sont disparue ou se sont retrouvés isolés. De la même manière on peut prévoir que s’il y aura un changement de régime à Téhéran, la plupart de ces groupes extrémistes islamiques vont disparaitre.

En effet, Téhéran appelle à un « État islamique mondiale » à la fois dans sa Constitution et dans d’autres textes. Khomeiny, le fondateur du régime, et Ali Khamenei, le guide suprême actuel, se sont ouvertement considéré comme les dirigeants des musulmans du monde entier, et pas seulement des chiites.

Dans la constitution iranienne il est déclaré que : «l’armée de la République islamique et les gardiens de la révolution sont établis non seulement pour protéger les frontières, mais aussi avec la mission de mener le djihad dans la voie de Dieu et la lutte pour étendre l’État de loi divine dans le monde ».

Pendant toutes ces décennies, Téhéran a mis en place des organisations et des institutions chargées de l’exportation et de la promotion de l’islamisme sous différentes formes. Même si Téhéran est une théocratie fondée sur les croyances chiites, il poursuit très sérieusement sa stratégie et ne se limite pas aux frontières sunnites-chiites. Téhéran dispose d’organes spécifiques pour influencer et recruter des groupes et des personnalités chiites et sunnites.

La création et le développement de l’État islamique en Irak et au Levant (Daech) a été le nouvel événement de ces dernières années dans la mouvance intégriste. Ce groupe, avec sa conception sunnite très archaïque, trouve ses origines dans une branche d’Al-Qaïda en Irak.

Daech a habilement exploité la colère légitime et la frustration des sunnites vis-à-vis des politiques sectaires du gouvernement iraquien précédent et a pu ainsi se développer en Irak. La répression sanglante des sunnites en Syrie par Bachar Assad a également contribué pour sa part à l’extension de cette tendance.

Assad a délibérément laissé Daech s’installer dans les régions riches en pétrole de la Syrie. Il a même libéré certains prisonniers pour qu’ils puissent rejoindre Daech et renforcer ses rangs. La capitale du soi-disant Califat Islamique, Raqqa, n’a été frappée par l’aviation d’Assad pendent longtemps.

Daech a eu une relation symbiotique avec le régime Assad, ce qui signifie que malgré leurs différences, les deux entités ont des intérêts vitaux dans l’existence mutuelle. En fait, Assad a créé une situation où la communauté internationale est obligée de choisir entre Assad et Daech.

Les gouvernements occidentaux ont omis d’adopter une politique décisive contre Bachar Assad, laissant pratiquement ses adversaires modérés seuls face aux attaques simultanées par Daech, Assad et les Russes.

 

La question urgente aujourd’hui est comment faire face à Daech et éliminer les attaques terroristes contre l’Europe

 

Il existe 3 options

Option 1 – D’adopter des mesures de sécurité en Europe et intensifier les frappes aériennes contre Daech et tolérer Assad. Comme nous l’avons déjà vu, de nombreux complots terroristes qui ont exposé l’Europe aux attaques ne seront pas arrêtés seulement par l’adoption de mesures plus strictes de sécurité intérieure.

Même si Daech sera vaincu, la menace ne va pas disparaître en Europe comme la présence d’Assad donnerait le dynamisme et l’inspiration aux autres pour réaliser des actes terroristes dans différentes parties du monde.

Option 2 – L’élimination de Daech avec l’aide d’Assad et de l’Iran, qui est l’option préférée du régime iranien. Maintenir Assad au pouvoir fournirait le prétexte à l’Iran de poursuivre ses ingérences, ce qui à son tour renforcera l’espace vitale pour l’existence des terroristes comme Daech. Le résultat serait de replacer Daech avec un califat chiite iranien.

Option 3 – Viser simultanément l’élimination de Daech avec et celle de Bachar el-Assad. Selon cette option, il est nécessaire d’aider l’opposition syrienne, car il peut fournir les troupes nécessaires sur le terrain. Cette option changera les conditions politiques et militaires en Syrie et privera Daech de son lieu de reproduction. Ce sera la fin d’une catastrophe de cinq ans qui a laissé plus de 500,000 victimes et plus de 10 millions de réfugiés sans abri. Ceci va sans aucun doute diminuer dans une grande mesure les raisons d’être du terrorisme. Cela arrêtera le flux des réfugiés vers l’Europe et pourrait ouvrir la voie à la majorité des réfugiés actuels pour revenir en Syrie. Cette option pourra fournir une solution durable.

La communauté internationale doit opter pour une politique visant à déraciner l’islamisme à sa racine. Le régime iranien est aujourd’hui le seule Etat dans le monde qui export activement et manifestement le terrorisme islamique dans le monde. Aujourd’hui environ 70000 soldats en Syrie sont commandés directement ou indirectement et financés par le régime iranien. Tant qu’Assad reste au pouvoir les groupes terroristes comme Daech vont continuer à exister.  L’ultime solution à l’islamisme c’est d’éliminer l’épicentre du terrorisme islamiste en Iran. Pour affronter l’intégrisme islamique il faut favoriser les mouvements musulmans démocratiques et tolérants: La résistance Iranienne sous le leadership de Maryam Radjavi représente l’antidote nécessaire à l’intégrisme islamiste. Lorsque Mme Radjavi parle de la séparation entre la religion et l’État, l’égalité des sexes, l’abolition de la peine de mort, la liberté d’expression et de  de pensée, les droits de femmes etc. Ces mots venant d’une femme musulmane envoient des frissons dans la colonne vertébrale des tyrans turbanés à Téhéran.

Les effets du renversement du régime en Iran sur le combat contre ce fléau seront colossaux à l’instar de ce qu’ont été les effets de sa prise de pouvoir en Iran. Dans cette éventualité, non seulement le Hezbollah au Liban et les Houthis au Yémen, mais aussi Al-Qaïda et Daech seront partout substantiellement affaiblis. Ils diminueront graduellement en influence pour ne devenir que des groupes isolés et obsolètes. Dans ce cas, la voie s’ouvrira pour l’instauration de la démocratie en Syrie et en Irak, et permettra d’assécher les racines de l’intégrisme islamiste dans le monde.

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